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mardi 16 août 2011

L’euro-obligation pourrait financer un budget fédéral

D'après une tribune du journal Le Monde, Le fédéralisme n'est pas la solution miracle à la crise, de Hubert Védrine, le fédéralisme ferait plaisir aux marchés. C'est confondre le message qu'ils renvoient du déséquilibre de l'euro (conjugué à la financiarisation excessive, qui lui est consubstantielle, Cf Fighting the wrong enemy, Paul De Grauwe, 2010), avec l'intérêt des financiers (1). Le fédéralisme, en palliant au défaut structurel de l'euro (2), réduirait les opportunités de spéculer.

L’Euro-obligation prendrait tout son intérêt à financer un budget fédéral, une des trois conditions assurant une zone monétaire optimale (ZMO, OCA en anglais), la théorie récompensée par un prix Nobel que les architectes de l’euro ont sciemment marginalisés. Aujourd’hui encore, alors que les faits nous en démontrent les conséquences suicidaires. La trame de ce billet est sugérée par le billet de Georges Ugeux traitant du même sujet, Les Euro obligations : un emplâtre sur une jambe de bois.

En commençant par les OCA, le débat s’orienterait vers la jambe de bois, et non sur l’emplâtre. En attendant un budget fédéral, compte tenu des réticences politiques, il faut chercher à instituer des transferts inter-états qui en répliquent le fonctionnement. Ce serait à alors une forme inter-gouvernementale de gouvernance dont se dessine le consensus. Commençons par l’assurance chômage car c’est le meilleur outil de stabilisation macroéconomique. L’euro-obligation permettrait de financer le solde résultant de la différences entre les dépenses (aides) et recettes (cotisations) consolidées de la zone euro.

Sauf à réfuter la théorie des ZMO, cette approche préviendrait les crises, au lieu de devoir les gérer dans l’urgence. Il s’ensuivrait un abaissement généralisé du coût du crédit. Même à considérer que le taux d’émission de l’euro-obligation serait une moyenne pondérée de celles ses membres, il serait donc lui aussi plus bas que la moyenne actuelle.

Ensuite, cette hypothèse de taux moyenné est probablement trop conservatrice. Les marchés sont animés, alternativement, par la peur et la cupidité, pas la rationalité. Et lorsque c’est la peur qui agit, les arbitrages entre pays de la zone euro prennent l’allure d’un jeu de chaises musicales : la Grèce perd sa place, puis le Portugal, après l'Italie etc.

Avec une obligation unique, le marché de la dette euro devrient l'égal de celui des Etats Unis en termes de liquidité et de garantie. Il n’est pas concevable que les investisseurs se refusent le deuxième marché obligataire au monde. Ce type de raisonnement est attesté par des études économétriques : les européens payent la fragmentation de leur marché obligataire, toutes choses égales par ailleurs. Même si le FESF est, comme son nom l’indique, un outil de gestion de crise, sa notation AAA, alors que seulement 2/3 de ses garants sont eux mêmes dans cette catégorie (d'après billet de Georges Ugeux pré-cité), en donne déjà un indice.

Quant à aux commissions substantielles «aux banques qui seront « élues » pour faire partir du syndicat de placement de ces émissions», ce calcul de Georges Ugeux est ambigu. S’il veut parler de l’euro-bond, puisqu’il ne s’agit pas d’émettre plus de dette mais simplement de la transférer de plusieurs supports à une entité consolidée, il n’y a pas lieu de craindre plus de commissions. Ces commissions sont en % des nominaux émis. En fait, le rapport de force évoluant en faveur de l’émetteur, le % devrait baisser.

Enfin, concernant la Banque Centrale Européenne, rappelons qu'au moment où se billet est rédigé, elle n'utilise sa prérogative de prêteur en dernier ressort que dans l'ultime urgence. Ceci a récemment été condamné par Paul De Grauwe (célèbre pour sa  prophétie de la crise de l'euro en 1998). Quoique en principe indépendante, on devrait s'attendre, à ce qu'elle compose avec le gouvernement fédéral, élu, de façon à gérer ce type de problème avec plus de pragmatisme.

(1) Incidemment, l'ancien ministre des affaires est lui même, depuis peu, un participant de la finance après avoir rejoint une banque d'affaire américaine selon DealBook, du NYTimes (cf ici). Ce même magazine souligne l'expérience des membres fondateurs de cette banque :  «Mr. Moelis knows banking ventures can end in tears. His three former employers all met sad fates — a scandalous collapse (Drexel Burnham Lambert), a takeover (Donaldson, Lufkin & Jenrette) and damage from the American housing crisis (UBS). This time he will be trying to make sure it’s different. », cf ici. (2) L'autre solution étant une redéfinition des frontières de l'euro, c'est à dire la sortie d'un ou plusieur pays, vraisemblabement parmi ceux appartenant à ce qu'il est convenu d'appeller la périphérie.

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